samedi 20 décembre 2008

Message #02

Françaises, Français,
Belges, Belges,
Camarades Communistes et Agents du Grand Capital,
Public chéri, mon amour,

Abordons un peu un aspect très quotidien de ma nouvelle vie chinoise : la confrontation avec la manière de conduire desdits Chinois.

Après ma première nuit où, éreinté, je récupérais quelques forces dans une charmante petite chambre qui apparemment a quand même été pensé pour un petit garçon ou une petite fille, je me promenais un peu autour de la maison que j'habite. Je regardais les voitures chinoises, qui sont globalement plus petites que les voitures canadiennes : faut dire qu'en Amérique, on a longtemps joué à qui aura la plus grosse. Je remarquais que sous certaines plaques d'immatriculation, il était écrit "Good Luck" (Bonne chance pour les brelles en anglais) et je me demandai (notez l'emploi du passé simple, c'est pas tous les jours qu'on le voit) : "Pourquoi ?"
La réponse ne tarda pas à venir sous la forme d'un premier voyage en voiture pour me rendre à la banque et récupérer des sousous.

Je le dis à ceux qui un jour compte conduire en Chine : n'ayez pas froid aux yeux ! Ça conduit au klaxon, sans cesse, et ça leur fait pas peur de se retrouver à contre-sens. De toute manière, ceux d'en face font un crochet. Les carrefours, c'est très folklo aussi : anarchie totale, chacun pour soi et le Parti pour tous ! J'ai déjà vu une file qui allait dans un sens, puis juste à côté la file qui allait dans l'autre sens, et à côté la file qui va dans l'autre sens, et ainsi de suite.
Le problème est que ces voitures ne sont pas équipés de ceintures de sécurité. Enfin, si, elles sont là, mais toutes les voitures que j'ai vues jusqu'à maintenant sont équipées de housses pour ne pas salir les sièges (Mais on salit les housses... Donc au final, c'est tout aussi sale visuellement parlant ! J'ai jamais compris le sens profond et métaphysique de l'utilisation des housses dans une voiture...), ce qui bloque nécessairement le mécanisme salvateur pour la boucler. La ceinture.
Tenez, hier encore, j'ai pris le taxi pour rentrer chez nous aux environs de 2h30 du matin après une nuit de débauche dans un bar : ça roule vite, ça grille les feux rouges, ça klaxonne pour que le piéton bouge son cul et parfois, ça pile parce qu'évidemment, l'autre d'en face avec son tricycle pétaradant qui date du Camarade Mao, il va pas aussi vite que nous.

En parlant du Camarade Mao, saviez-vous que maintenant, dans la Chine communiste du XXIe siècle, dire à quelqu'un "Camarade" signifie qu'il est gay ?
Enfin, comme disait l'autre, je m'égare (d'Austerlitz).

Tous les matins, je dois pour atteindre mon arrêt de bus traverser la grande route qui compte six-voies. Là aussi, on apprend à ne pas avoir froid aux yeux... On attend une petite opportunité, et on court ! En espérant que de l'autre côté les voitures n'arrivent pas trop vite. Je me suis déjà retrouvé au milieu de cette six-voies à marcher tranquillement en attendant une autre opportunité pour traverser le reste, entouré de voitures, de cars, de camions qui globalement ne vont pas trop vite quand même. Faut pas les pousser les moteurs chinois. Mon nouveau cellulaire que j'ai acheté ici peut prendre des vidéos. Donc, peut-être qu'un matin j'essayerai de filmer ce grand périple quotidien qui consiste à traverser Chongqingzhongi Lu. J'en profite pour vous donner votre premier cours de chinois : Lu ne signifie pas "petit-biscuit-de-blé-avec-un-carré-de-chocolat-noir-dessus" mais "route, rue, chemin, avenue". Donc tous les noms de route ici se terminent par "Lu".

Abordons enfin pour rester dans le trafic le cas des transports en commun de Qingdao. Pas de métro, seulement des bus. Et quels bus ! Certes, ceux qui sont à destination du centre-ville sont beaux, très jolis et tout ça, mais dès qu'on s'en éloigne un peu, on tombe sur des vieux tacots qui doivent pas être de toute première jeunesse. Tous les matins, je prends le 606, puis un changement à Zhong Han pour prendre le 125 ou le 126, ça dépend. Le 606 est toujours bondé. Tous les bus chinois sont toujours bondés de passagers. Et ils me regardent tous, les vicieux. Faut dire que des blancs dans un bus populaire aux heures de pointe, ça se trouve pas sous n'importe quel drapeau rouge. Mais pour revenir au bus, je soupçonne les amortisseurs d'avoir fait leur temps. Et comme la route mériterait bien d'être refaite également, le bus se transforme en tape-cul quand vous avez la chance de dégoter une place assise. Pour dégoter une place assise, surveillez celui qui se lève et dépêchez-vous de prendre la sienne. Regardez pas les autres. Demandez pas. C'est une course. C'est pareil pour monter dans le bus. Cherchez pas où commence la file d'attente, on se met pas en ligne pour monter sagement. On repère où le bus s'arrête, on court et on bouscule les autres. Et si le bus est déjà plein, forcez un peu, tassez. Quand y'en a pour 50, il doit bien y en avoir pour 60.
Par contre, il s'agira de ne pas manquer son arrêt. Les arrêts de bus ne sont pas présents à chaque carrefour mais plutôt à chaque kilomètre ici... voire plus. Et comme le chauffeur demande parfois simplement si quelqu'un veut descendre, vous avez intérêt à comprendre le chinois. Ne cherchez pas le bouton rouge pour demander l'arrêt du bus, y'en a pas.

Mais il faut voir le bon côté des choses : c'est à ce genre de détails que je suis sûr d'être en Chine.

Parmi les autres billets que je devrai écrire, il faudra que je mette un petit mot sur le pourquoi du comment de ma présence en Chine. J'ai vu une question ou deux dans les commentaires pour mon premier billet (quel succès, en passant).

samedi 13 décembre 2008

Message #01

Bonjour à tous et à toutes,

Comme promis, j'ouvre un blog pour vous faire part de mes expériences en Chine. Théoriquement, seuls les gens que je connais (et qui par politesse vont témoigner d'un minimum d'intérêt pour moi) devraient avoir cette adresse. Si vous débarquez ici par hasard, vous pouvez partir. Bande de voyeurs.

Cela fait maintenant un peu plus de deux semaines que j'habite Qingdao, ville de sept ou huit millions d'habitants dans la province de Shandong, Chine. Dépaysement total. Après deux semaines, je commence à m'habituer gentiment mais sûrement à mon nouvel environnement, après avoir connu un petit passage de mal du pays à la fin de la première semaine. Je commence à connaître cette sensation et à savoir composer avec. Comme m'avait dit un pharmacien grec un jour où je souhaitais acheter un médicament pour me soigner, "Ça sert à rien, ça va passer" (Service maximum, en Grèce). Mais de fait, c'est passé.

Le voyage a été éprouvant. 25 heures environ de porte à porte, et avec le décalage horaire, je suis parti un jeudi à l'aube pour arriver un vendredi soir. Avis à mes amis (j'en ai) de Montréal : le décalage horaire est de 11h. Vous vous prenez ça dans la gueule, c'est quelque chose de violent, hein. Le réveil a sonné à 4h du matin jeudi, après un sommeil de seulement trois heures et des derniers jours à Montréal particulièrement éprouvants pour ma santé mentale. J'ai plusieurs fois échappé à des saignements de nez, tiens. À cinq heures, le taxi est en bas, prêt à m'emmener à l'aéroport. Plus qu'à poireauter pour un avion Air Canada à destination de Vancouver. On commence par s'échauffer gentiment, c'est un petit vol pour pédés : même pas six heures. C'est génial la technologie moderne et les petits écrans personnels. Par contre, quel bande de rapiats ! Les plats sont payants maintenant. L'hospitalité canadienne n'est plus ce qu'elle était.
Arrivé à Vancouver. C'est beau. Enfin, je dis ça, j'ai vu que l'aéroport, hein. Mais l'aéroport est beau, voilà. On patiente gentiment pour un avion Air China à destination de Pékin. Là, c'est du lourd : plus de 11h. Et les repas sont gratuits. Faut admettre que les Chinois sont pétés de tunes (En passant, il se vend une Porsche par jour à Qingdao, et pas au prix Made in China), eux. On commence doucement à s'immiscer dans un environnement chinois/anglophone. En effet, on oublie le français dorénavant.
Le vol me fatigue, surtout que je ne dors pas vraiment dans les avions. Passagers bigarrés. Beaucoup de Chinois mais aussi d'Indiens. Un Sikh dormait en se penchant en avant, son gros bonnet lui servant d'oreiller sur le siège de devant. Pas con. Je regarde souvent ma montre, j'en ai marre. Les films ne m'amusent plus...

Arrivé à Pékin. C'est donc ça la Chine communiste et le plus gros pourvoyeur de condamnés à mort ? Bin ma première impression, c'est que ça sent le Canard Harpic WC et l'eau de javel. Ça sniffe le propre, quoi. Les formalités administratives sont rapidement expédiées, mon visa est en règle et j'ai rien à déclarer à part du sirop d'érable, gage de paix entre nos deux nations que je compte offrir à la taulière, à la mère de famille qui va m'héberger.
On attend encore un peu, incapacité de me rappeler du code de ma carte Mastercard. Heureusement, j'ai tous mes papiers avec moi, y compris mes relevés de compte et bien planqué quelque part mon code (Je suis du genre prévoyant). Mais impossibilité de retirer de l'argent. Petite panique, et je ne dirai pas comment ça s'est réglé tout de suite. Je le ferai dans un autre billet.

Vous avez vu comment j'arrive à créer du suspense à partir de rien ?

Modestement, je m'aime.

Dernier avion, pour la route. Pékin-Qingdao. Une petite heure. Tellement éreinté après 23h sans dormir que je dors pendant pratiquement tout le trajet. À Qingdao, on vient me chercher, comme prévu. Un petit café bien serré pour gagner quelques minutes d'attention. Mon contact me confie une carte de Qingdao, quelques livres touristiques et un mini-dictionnaire anglais-chinois. Ensuite, on prend le taxi pour rejoindre ma famille. C'est la nuit totale, je ne vois pas très bien où je suis. Et puis je m'en fiche. Je veux juste dormir.
Arrivé dans ma famille, j'offre le cadeau diplomatique. Je prends une douche, ça délasse. Je me couche. Le matelas est bien dur, mais I fuckin' don't care. C'est ma première nuit chinoise. Et la fin de ce billet.

Pourtant, j'ai encore plein de choses à raconter. Il faudra que j'évoque dans mes prochains billets : la manière de conduire des Chinois ; les transports en commun de Qingdao ; la gastronomie locale ; et il faudra aussi que je me questionne sur le fait de savoir si être riche peut nous changer...

Allez, salut et... Bonzaï.